La mostarda italienne : origines, recettes et marques (non, ce n’est pas de la moutarde ;-)

Tout savoir sur la mostarda di frutta italienne : origines, recettes, marques
Mostarda italienne
Pour être plus fidèle à la tradition italienne, j’aurais dû vous parler de ce produit particulier, unique, qu’est la mostarda di frutta (rien à voir avec la moutarde française) en période de fêtes de Noël. Mais bon,  le temps passe et j’en consomme tout l’hiver, donc nous sommes encore à temps. Je vous avais d’ailleurs déjà touché deux mots sur la mostarda de Cremona à propos des tortelli di zucca (ravioli de potiron un peu doux, une recette magnifique).
Généralement la mostarda est un peu méconnue hors frontières, mais certains d’entre vous connaissent bien cet ancien condiment à base de fruits. Pour les autres, curieux et gourmands, à la recherche de produits originaux et ancestraux, je me suis dite que cet article tout savoir sur la mostarda (y compris comment la consommer) pouvait vous être utile…
Personnellement, je l’ai découverte à 20 ans et cela a été un coup de coeur surtout pour toutes ses possibilités en cuisine. je n’ai jamais osé me lancer à la maison (ce n’est pas difficile) à cause de la moutarde 😉
Une trace du mélange sucré-salé et des goûts particuliers de la Renaissance, qui a ensuite presque disparu dans la cuisine française et italienne.
La mostarda : qu’est-ce que c’est ?

La mostarda est un condiment conserve typique du Nord de l’Italie, à base de fruits confits… mais piquant grâce à la présence de la moutarde. Drôle de truc me direz-vous, c’est en effet étonnant mais ça marche très bien (depuis des siècles).
En gros, les fruits, qui changent selon les régions et qui peuvent être entiers ou en morceaux ou même en purée, sont confits dans plusieurs bains de sucre (un peu comme les oranges confites ou les marrons glacés) pendant plusieurs jours. Ce qui va se passer c’est que le sucre va peu à peu remplacer l’eau de fruits et garantir donc une bonne conservation.
Pour les proportions cela dépend des fruits et des traditions. Le sucre peut représenter de 50% à 100% du poids des fruits. Ces derniers doivent être bien sûr impeccables niveau texture et aspect et pas trops mûrs.
Mais la grande surprise, qui est aussi témoin de l’ancienneté de la recette, c’est qu’à la fin on y ajoute des graines en poudre ou, plutôt désormais de l’huile essentielle de moutarde (apparemment on en trouve en pharmacie) Et c’est elle qui, non seulement va permettre une longue conservation à température ambiante même sans stérilisation (la moutarde est puissante comme vous avez pu constater :-), mais surtout va donner un petit coup de fouet (discret) au côté sucré de fruits.
D’ailleurs la mostarda se consomme en Italie principalement dans les mets salés et en période de Noël (elle est considérée comme produit de luxe).
Ses origines ?

Le mot peut sembler ambigu et nous faire penser tout de suite à la chère moutarde française (que j’adore). En fait l’étimologie vient du mot mosto (moût, ça vous rappelle la saba ou le mosto cotto ?) comme pour la moutarde. Mais leur seul point commun est justement le piquant donné par les graines (ou aujourd’hui plutôt l’huile essentielle) de moutarde. Pour les reste, c’est deux univers à part.
Il semblerait que les premières traces de mostarda (mais très différente de celle que nous connaissons aujourd’hui) remontent à l’époque de la Grèce antique puis des Romains  où pour mieux conserver le moût de raisin on y ajoutait un élément piquant qu’est la moutarde (épice précieuse). D’ailleurs le nom vient de mustum ardens (moût ardent comme pour la moutarde de Dijon ;-). Par la suite, on utilisait comme base principalement des coings.
Mais la mostarda que nous connaissons aujourd’hui à base de fruits est née dans des monastères du Friuli au XIIIème siècle. C’est tout simplement une façon de conserver le surplus des fruits d’été en hiver. La méthode s’est répandue dans tout le Nord de l’Italie (de la Ligurie à la Vénétie et Émilie-Romagne jusqu’en Toscane).
Aujourd’hui, la fabrication est tant industrielle qu’artisanale mais la recette et le principe restent les mêmes.
Quoi faire avec ? Des recettes ?
Bon, et le côté pratique me direz-vous ? Une fois que je l’ai dénichée qu’est-ce que je fais avec ?
À part le fait que, comme toujours, cela relève des goûts personnels, je vous dit avec quoi on l’associe généralement.
La mostarda (après on peut choisir le type de fruit) se marie traditionnellement avec le bollito (une sorte de pot au feu), avec des fromages de brebis ou des bleus (comme le gorgonzola ou le roquefort), des salamis (notamment avec les agrumes), du jambon cru (avec le melon ou la pastèque par exemple) du lardo de Colonnata, le parmesan, la ricotta fumée ou le pecorino (avec des pommes et des poires)…
J’ai aussi essayé avec une salade ou un strudel à base de légumes d’hiver cuits (potiron, brocoli…) et c’est dléicieux. On peut aussi en ajouter dans une salade crue avec du fromage, à côté d’un rôti de boeuf ou de canard et même de crevettes (notamment les mostarde à base d’agrumes).
Sur le blog vous avez deux recettes :

Où la trouver et quelles marques choisir ?
Là arrive l’aspect un peu de niche (pardon, c’est un peu comme les pomodorini del piennolo ;-). 
On en trouve bien sûr sur place au Nord de l’Italie, dans des épiceries fines, les marchés mais aussi sur le net.
En France, certaines épiceries fines italiennes (comme Rap 15, rue de Rodier dans le 9° à Paris ou en ligne Les 4 Gourmets, Bien manger, Mon Italie en Ligne) mais pas que, en vendent aussi (chez Izraël à Paris par exemple).

Pour les marques, il y a un peu de tout, les industrielles, les artisanales… Généralement ces dernières sont meilleures, non seulement pour la qualité des fruits mais aussi pour le dosage équilibré.
Parmi les producteurs vous trouverez la Sperlari (même en grande surface et dans plusieurs épiceries en France), la plus répandue mais ce n’est pas celle que je préfère… on sent surtout le sucre et pratiquement pas le piquant 😉
Sinon, il y a la Fieschi, Lazzaris, la Cascina di San Cassiano (leurs confitures aussi sont très bonnes), Luccini
Les différents types de mostarda à travers l’Italie
Ainsi qu’indiqué à plusieurs reprises et contrairement à ce que j’ai pu lire ;-), la mostarda dans le sens fruits confits piquants est vraiment un produit typique du Nord de l’Italie (enfin, jusqu’en Toscane). Il existe d’autres condiments appelés mostarda aussi au Sud (Pouilles, Calabre et Sicile ou même plus au Nord au Piémont) mais c’est un autre produit et sans le côté moutarde. Ils sont plutôt dérivés de préparations à base de moût de raisin.
Il existe aussi bien sûr des versions plus créatives : aux marrons, cerises ou même aux légumes (comme le potiron ou le céleri).
Voici les traditionnelles (histoire de vous y retrouver ou de vous emmêler les pinceaux… je plaisante hein). Tout un monde…
En Lombardie :
  • Mostarda de Cremona : c’est la version la plus connue et peut-être la plus luxueuse (dont Catherine de Médicis était friande) puisque à base de fruits entiers et notamment de figues, abricots, pêches, pommes, poires, cerises… C’est celle que vous voyez sur la photo.
  • Mostarda de Mantova (Lombardie) : à base de coings
  • Mostarda viadanese : à base de poires en tranches
  • Mostarda  de Milano : fruits mélangés (dont souvent des pommes)
  • Mostarda de Voghera : semblable à celle de Cremona, avec des fruits confits entiers mais moins variés (plus frugale)

En Vénétie :
  • Mostarda vicentina : à base de pommes coings ou poires cuits comme une confiture ou passée au moulin à légume avec souvent des écorces d’agrumes
  • Mostarda de Verona : la seule à base de légumes

En Émilie-Romagne : 
  • Mostarda bolognese : à base de poires et de prunes en purée

En Toscane : à base de moût de raisins, pommes, poires et cédrat.
Et vous vous la connaissez ? Vous l’utilisez comment ?

26 réflexions au sujet de “La mostarda italienne : origines, recettes et marques (non, ce n’est pas de la moutarde ;-)”

  1. Un très bel article ! Pour moi, la mostarda ça restera toujours Alberto Sordi dans Un americano a Roma qui mange un plat infâme qu'il veut américain en disant "La mostarda ! What's namon la mostarda!"… et fini par se jeter sur un bon plat de pâtes 🙂

    ça m'a toujours donné envie d'y goûter ^_^

    Très belle soirée

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  2. solo una piccolissima precisazione campanilistica 🙂 voghera è in lombardia! 😀 comunque bellissima presentazione di questo prodotto molto particolare…

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  3. Jolie découverte pour moi (encore merci..).
    Sur inspiration de W. Ledeuil, je l'utilise dans des jus ou des bouillons, où elle apporte une touche subtile.
    En effet, la qualité est importante pour obtenir un bel équilibre entre le sucré du confit et le piquant de la moutarde.
    Merci pour ce bel article.
    Bonne journée
    Danielle

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  4. J'en ai acheté un pot il y a environ un an… sans trop savoir avec quoi on devait la consommer. Comme je suis friande de confitures sucrées-salées-épicées (piments rouges, confiture de Noël, etc.) lorsque je prépare un beau plateau de fromages, c'est avec grand plaisir que j'ai marié mostarda et formages! Depuis, j'en sers également comme accompagnement à la raclette. Un vrai régal! Merci pour les autres suggestions de dégustation!

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  5. Adoro la mostarda di frutta. Confesso che quando ho visto il post speravo di trovare una ricetta da te sperimentata. Quella che ho e feci tanto tempo fa non mi convinse troppo…Pensi di provare a farla?
    :)))

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  6. Je ne connais pas du tout cet ingrédient et ça y est ma curiosité est en éveil avec toutes ces variétés, une vraie palette en effet digne de s'emmêler les pinceaux!!!….merci encore et toujours pour découvrir chaque jour un peu de votre beau pays!
    Bonne soirée à vous…
    Mamijo

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  7. J'aime, j'aime beaucoup la mostarda!
    C'est synonyme de Noel, des tortelli alla zucca e du "lesso"!
    En plus, un bocal de fruits hauts en couleur c’est beau !
    Une petite astuce pour les intéressées: dans les recettes salées au potiron, notamment dans le risotto, on peut utiliser un petit peu de mostarda pour relever le potiron, surtout quand il n'est pas top au niveau de goût.
    Ma marque préférée: Barbieri, de Voghera. Incroyable choix du fruits et légumes…et surtout on peut choisir le niveaux de piment et se fier de l’échelle utilisée, ce qui est rare!!!!
    (souvent la “mostarda piccante” se révèle très peu pimentée et trop sucrée, surtout dans les marques grandes surface. En plus, dans une bonne mostarda, le goût de fruits doit percer à travers le sucre et le piment…c’est alors amusant de comparer les différentes nuances !)

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  8. Ca y est, j'en ai trouvé!!!!! j'étais en vacances à Cesenatico et en nous promenant à Cesena j'ai enfin trouvé de la mostarda!!! J'ai hâte d'y gouté. C'est en vous lisant que mon envie (ma quête…) a débuté et impossible d'en trouver par chez moi. Maintenant à gouter!

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  9. My grandfather used to make this in his pastry shop before I was born and into my preteen years until 1959! I know I must have tasted it but alas memory fades. As we cook and cook well it will be added to our recipes 🙂

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  10. Bonjour, la mostarda di Cremona, je connais car Papa e nato in Cremona, et depuis 1963, ogni anno , mes vacances à
    Torre De Picenardi, Piadena à +/_ 25km de Cremona, io me la mangio con il cotechino o i tourtei di zucca, l’anatra o ancora pane e gorgonzola et voilà. Moi, c’est Manuela et avec mon époux Johny qui aime beaucoup la mostada, on se régale. Alors , à bientôt, à la prochaine. Gros bisoux de nous deux!

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    • Merci merci Manuela pour les souvenirs gourmands c’est super bon en effet avec les tortelli, la canard… avec plein de choses finalement !
      Gros bisous à vous deux !

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  11. Je suis arrivée par hasard sur cette page. Je suis québécoise et j’ai envie de vous dire qu’ici, nous avons une recette traditionnelle et très populaire. Nos étés sont courts. Donc, il s’agit de rassembler les fruits mûrs comme les pommes que nous cultivons en abondance et les poires et pêches qui nous viennent en grande partie du sud de l’Ontario. On appelle ça du ketchup au fruits, donc cuits et mis en conserve dans du vinaigre blanc et des épices comme les grains de moutarde. Nous consommons ce “ketchup” en hiver avec du porc, principalement. Je doute fort qu’il y est des origines grecques ou romaines en ce cas. Mais, c’est une excellente façon de parfumer son palais des saveurs de l’été durant notre hiver qui dure en général huit bons mois. Bon, j’ai mis un signet (bookmark?) car j’ai l’intention de lite et essayer vos recettes même si certains produits sont inconnus ici. Pour ma part, je pourrais vous citer des dizaines de recettes basées sur le sirop d’érable et le maïs frais en épis qui n’est disponible qu’en juillet mais qui fait l’objet de multiples “parties de blé-d’Inde”.

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