Spongata, tarte italienne aux fruits secs

Spongata, tarte italienne aux fruits secs et confits typique de l'Emilie Romagne et de Noël
Spongata, tarte italienne aux fruits secs

Aujourd’hui je vous propose une tourte ou tarte italienne très ancienne, gorgée de bonnes choses et emblématique de l’Emilie-Romagne : il s’agit de la Spongata, un tarte garnie de fruits secs, confits et épices paraît-il née au XIVème siècle (rien que ça), préparée et offerte surtout à Noël. Bon, désormais, on en consomme toute l’année et elle est idéale si vous avez à vider des fonds de placards avec des fruits secs etc… Une recette dédiée à une lectrice qui me l’a demandée.

Un gâteau qui parait un peu simple (en effet aucune technique particulière au contraire, faut juste mélanger) et rustique par son aspect mais qui se révèle vraiment superbe à la dégustation. Cette farce à la fois dense, parfumée et un peu humide et cette pâte légère en bouche, friable… il faut vraiment y goûter pour tomber sous le charme.

Ses origines sont juives (comme nombre de gâteaux de ce genre, surtout aux fruits secs) mais la Spongata (la plus connue est celle de Brescello, la version que je vous donne) s’est ensuite répandue et a connu un vif succès dans toute la région auprès de la noblesse locale (gâteau de luxe) au point qu’elle était souvent offerte dans les rapports diplomatiques. On les moulait dans des formes en bois qui « tatouaient » des dessins ou symboles de la famille. Elle a l’avantage de plus de bien se conserver et voyager (primordial à l’époque). Il existe plusieurs petites variantes (je vous donne celle qui à mes yeux est la plus fine mais c’est subjectif) et même des gâteaux semblables dans d’autres régions comme la Toscane, la Ligurie et la Lombardie.

J’ai une amie emiliana qui chaque année prépare en bonne compagnie quelque chose comme 30 à 40 spongate à offrir à Noël : ça m’a toujours impressionnée et c’est dire oh combien c’est une tradition ancrée. La spongata connait aujourd’hui un succès aussi de l’autre côté de l’Atlantique grâce aux émigrés italiens. Un tarte pleine de bonne énergie pour bien commencer la journée ou à déguster au goûter avec un café ou un thé.

Spongata, tarte italienne aux fruits secs et confits typique de Noël
Spongata, tarte italienne aux fruits secs

Spongata, tarte aux fruits secs et confits typique de l’Emilie-Romagne (pour une tourte de 20-22 cm, 6 à 8 personnes)

Préparation : 20 min (+ un jour de repos) Cuisson : 50 min

Pour la pâte :

  • 300 g de farine ordinaire T55 (ou de la T65)
  • 100 g de sucre
  • 100 g de beurre un peu mou
  • 2 à 3 c à soupe d’huile d’olive + un peu
  • 10 cl environ de vin blanc sec (ou d’eau de fleur d’oranger*)
  • une pincée de sel

Pour la farce :

  • 200 g de miel délicat (acacia, oranger, romarin…)
  • 60 g d’amandes entières à moudre (ou de poudre d’amandes)
  • 60 g environ de chapelure (ou de miettes de biscuits assez neutres)
  • 50 g de noix
  • 50 g de noisettes
  • 50 g de raisins secs
  • 50 g d’oranges confites (recette maison ICI)
  • 50 g de cédrat confit
  • 40 g de sucre
  • 30 g de pignons de pin (de qualité, de Méditerranée)
  • Épices en poudre ou fraichement moulues (l’idéal surtout pour la noix de muscade) une bonne pincée de chaque : cannelle, noix de muscade, clou de girofle, poivre blanc
  • cognac, eau de vie, eau d fleur d’oranger*
  • une pincée de sel
  • sucre glace pour la finition

1. Préparer la farce la veille. Faire torréfier les noisettes et les noix au four pendant 10 min à 160°C (étape non obligatoire). Mixer ensuite le tout avec le poudre d’amande (ou les amandes entières déjà mixées finement avec un peu de sucre).

2. Tremper les raisins dans le cognac (ou autre liqueur type rhum ou même de l’eau de fleur d’oranger). On peut y ajouter aussi les fruits confits si un peu secs. Dans une casserole faire fondre le miel doucement avec le sucre. Ajouter les fruits secs puis les fruits confits (égouttés si besoin) et enfin la chapelure. Laisser cuire à feu doux encore quelque minutes de manière à obtenir un ensemble un peu pâteux. Eteindre, ajouter les raisins égouttés (garder l’alcool), les épices et les pignons et mélanger. Si l’ensemble semble trop ferme, ajouter l’alcool des raisins. On doit obtenir une pâte ferme mais pas trop. Mettre le tout dans une assiette creuse, couvrir de film alimentaire et laisser reposer une nuit à température ambiante.

3. Le lendemain, préparer la pâte : dans un saladier, mélanger la farine, l’huile et le beurre un peu mou du bout des doigt de manière à obtenir un mélange sablé. Ajouter le sucre, le sel puis le vin blanc peu à la fois afin de vérifier la texture (s’arrêter quand la pâte est liée). Travailler la pâte avec le crochet plat (si robot) ou à la main, en la repliant, jusqu’à ce qu’elle soit lisse et homogène (attention à ne pas trop la travailler ni la chauffer, juste ce qu’il faut pour qu’elle tienne bien).

4. Etaler la pâte sur un plan de travail légèrement fariné à 3 mm d’épaisseur environ. Couper deux disques de 22-24 cm. Enrouler le premier sur le rouleau et dérouler sur un moule rond de 20 cm (ou 22 si on n’en a pas). Faire bien adhérer les bords (il n’arrivera pas jusqu’en en haut c’est normal). Verser à l’intérieur la farce, l’étaler de manière homogène (même avec les mains ou une cuillère un peu humide). Poser dessus l’autre disque de pâte, pincer ou replier les bords pour bien sceller.

5. Piquer la surface avec une fourchette, badigeonner avec un peu d’huile et mettre au frais pendant que l’on préchauffe le four à 180°C.

6. Quand le four est chaud, enfourner pendant une demie-heure environ : la pâte doit colorer mais pas trop et le dessous doit être cuit (un peu doré : ce sera facile car la farce est peu humide). Sortir du four, laisser tiédir puis démouler. Déguster à température ambiante saupoudré de sucre glace.

Conseils :

Conservation : pour une fois, très bonne nouvelle, ce gâteau se conserve longtemps (pas encore entamé) des jours et des jours voire une bonne semaine (si pas plus) dans un endroit sec et frais (pas de frigo). Elle y gagne à reposer au moins un jour pour que les parfums diffusent. La farce seule se conserve aussi plusieurs jours à température ambiante (d’antan on la faisait reposer jusqu’à 20 jours ! je n’ai pas osé). La pâte se conserve aussi un jour au frais mais personnellement je conseille de l’utiliser tout de suite, c’est plus simple, plus besoin de la chauffer, l’étaler, la texture est déjà bonne tout juste préparée.

Farce/garniture : il y a toujours des fruits secs, confits, de l’alcool… après les proportions peuvent varier et dans certaines versions plus essentielles il y a plus de pain (des fois des restes de biscuits comme des amaretti) et de la confiture à la place des fruits confits (je préfère de loin avec les fruits confits). Je trouve que ce qui donne vraiment une note unique et inoubliable sont les fruits confits (notamment le cédrat si vous en trouvez) et les pignons, outre bien sûr les épices et le parfum de l’alcool, très discret. Les épices aussi peuvent un peu varier mais c’est celles-ci qui sont et étaient le plus utilisées. Certains y mettent du cacao mais non seulement ça ne fait vraiment pas partie de la tradition et puis je trouve que cela couvre les parfums du reste.

*Fleur d’oranger : elle ne fait pas du tout partie de la recette traditionnelle (en même temps nous sommes en Emilie-Romagne et c’est un ingrédient non utilisé là-bas, pas comme en Sicile par exemple). Mais j’ai essayé avec (dans la farce et surtout dans la pâte à la place du vin) et c’est magnifique : cela lui donne un côté léger, unique (mon mari a adoré) qui reste subtil. Le seul hic c’est que le parfum s’évanouit après un ou deux jours (donc vaut mieux la consommer rapidement).

Pâte : c’est une pâte particulière ancienne et très italienne. Sans oeufs et liée avec du vin blanc (on retrouve d’ailleurs cet aspect aussi parfois dans la cuisine grecque ou espagnole). Il y a rigoureusement du beurre et une touche d’huile pour la texture plus souple. Souvenez-vous que nous sommes au Nord, l’huile d’olive n’est pas produite localement et on consomme beaucoup de beurre (ou du saindoux). D’ailleurs c’est aussi avec le lait (une partie de son gras) destiné au parmesan que l’on fabrique le beurre.

Cuisson et dimensions : avec ces quantités, on peut fabriquer un ou deux gâteaux. Bien sûr dans ce dernier cas, ils seront plus petits (18-20 cm de diamètre) et plus plats. Il y a plusieurs écoles et, personnellement, je préfère un seul avec une garniture plus généreuse. En effet dans l’autre cas, c’est plus compact et la pâte est plus cuite/croustillante mais on risque d’avoir un farce moins moelleuse puisque le tout est plus petit et va cuire plus. À vous de tester et de choisir.

Sucre : sur la carte, elle peut sembler bien sucrée (je craignais aussi) mais en réalité elle est bien équilibrée (la pâte l’étant peu et la farce variée et parfumée) je trouve. Bon après ce n’est pas du jus de fruit nature hein mais un gâteau de fête et une tranche suffit.

Recette : je me suis inspirée d’un super livre de cuisine italienne (édité en 1967 ! sans aucune photo mais juste quelques illustrations comme on n’en fait plus et qui prennent des années à être écris) dont je vous ai souvent parlé La cucina regionale italiana de Anna Gosetti della Salda. Dans une note à la recette, qui m’a fait sourire, elle indique que désormais (années 60 !) plus personne ne la prépare maison mais il reste juste quelques pâtissiers et industriels qui la confectionnent à Noël. En réalité, on la prépare encore aujourd’hui maison (la preuve) et c’est vraiment à portée de tous.


18 réflexions au sujet de “Spongata, tarte italienne aux fruits secs”

  1. Tiens ça me fait penser aux mince pies anglaises… Vous croyez qu’au format individuel (en raccourcissant la cuisson vu que vous dites que sinon c’est trop sec) ça ressemblerait à ces pies ?
    Bonne journée !

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    • Bonjour Justine,
      Oui nous sommes dans le même univers mais les mince pie sont quand même plus fruités et humides (il y a souvent des fruits frais aussi). Personnellement je déconseillerais la version individuelle pour une question d’équilibre pâte/farce, ce qui est agréable ici est vraiment la quantité de farce par rapport au type de pâte. Après à vous de voir 🙂
      Bonne journée également !

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  2. Votre recette me fait penser aux minces pies, mais ça me plaît davantage ! même si le côté moelleux ressortirait moins, en version mini tourtes ça doit être sympa aussi. En tout cas, une belle découverte

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  3. Merci pour la recette,Edda. Je vais l’essayer. Vous dites que ses origines sont juives. Cela m’a fait penser à un nougat que j’ai mangé dans ma jeunesse. Il faisait partie des mets préparés pour la Pâques juive. Il était un peu épicé, délicieux. Cela fait des années que j’en cherche la recette, mais sans succès. Peut être pourrez vous m’aider? En tout cas, c’est un plaisir immense de vous suivre sur le blog

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  4. Bonjour Edda,

    Merci pour cette belle recette !
    Est-il possible de remplacer le beurre de la pâte par de l’huile ou autre ?
    J’aimerais réaliser cette recette version sans lactose.

    Merci d’avance

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  5. Bonjour Edda
    J aime beaucoup votre blog et vos recettes, si jolies et délicieuses..
    J’habite à Rome et j’aimerais savoir à quoi correspond ici la farine de petit épeautre et celle de grand épeautre souvent utilisées dans les recettes de blogueuses que j’aime.
    Merci beaucoup et bon week-end
    Laurence

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    • Merci beaucoup Laurence pour le message et la fidélité !
      L’épeautre (toujours le grand autrement c’est précisé) c’est le farro, d’ailleurs produit localement au centre de l’Italie. On trouve sa farine en magasin bio mais aussi dans nombres de supermarchés (la Coop par exemple).
      Le petit épeautre (qui est une autre plante) est plus de niche, très français et a d’autres propriétés mais surtout est beaucoup moins passe-partout en cuisine par rapport à l’épeautre (que je préfère). Personnellement je n’en ai jamais vu en Italie.
      Bonne journée et à bientôt !

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  6. ah une belle recette qui va me plaire puisqu’elle contient des fruits secs et pas de crème ( eh oui Edda à la Crème je vais t’appeller ! ) mais je suis trèstentée par des portions individuelles . je te dirai

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    • 😉 Personnellement je préfère la grande version car il y a moins de pâte et on apprécie mieux la farce spéciale. Mais à tenter en individuel.
      Bonne journée !

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  7. A Noel ma grand-mère originaire d’Émilie Romagne préparait des petits chaussons individuels avec la farce de la Spongata.
    Est ce que vous connaissez cette façon de faire : des chaussons au lieu d’une tarte

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    • Bonjour Sylvie,
      Oui on peut aussi en faire des chaussons individuels. Vous pouvez utiliser la même pâte, former des disque de 10 cm (après ça dépend on peut varier les dimensions), recouvrir puis bien sceller les bords et les cuire.

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